Compteurs Linky : tout savoir pour mieux comprendre

Tout savoir sur le compteur Linky

 

Après une expérimentation menée dès 2010, le déploiement des compteurs Linky s’est généralisé fin 2015. Des millions de ménages sont désormais équipés et d’autres devraient l’être l’année prochaine.

Certains consommateurs se sont opposés à la pose, soutenus par des collectifs de citoyens, des associations de consommateurs dont INDECOSA-CGT et des syndicats. Des communes ont rendu des arrêtés pour suspendre les installations sur leur territoire, généralement cassés par les Tribunaux Administratifs.

Aussi, faisons le point sur les textes qui encadrent ce déploiement massif et examinons les inquiétudes qui persistent pour de nombreux adhérents. Quelles réponses actuelles sur ce sujet précis et quelle est la position d’INDECOSA-CGT ?

Les textes

Au commencement du développement des compteurs « intelligents », se trouve la directive européenne 2009/72/CE du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité : « Les États membres veillent à la mise en place de systèmes intelligents de mesure qui favorisent la participation active des  consommateurs  aux  marchés  de la  fourniture  de gaz  et d’électricité ».

La France a transposé cette directive en droit interne par une loi 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité et son décret d’application 2010-1022 du 31 août 2010 relatif aux dispositifs de comptage sur les réseaux publics d’électricité.

La loi de transition énergétique du 17 août 2015 est venue entériner le déploiement généralisé des compteurs Linky dans les foyers français d’ici 2021. L’objectif affiché est une réduction globale de la consommation d’énergie pour mieux adapter la production, mieux gérer les pics de consommation et pour permettre au consommateur, qui aura accès à sa consommation réelle, de la maîtriser mieux. La France a choisi de l’imposer, d’autres pays n’ont pas fait ce choix.

Qui installe ces compteurs ?

C’est la société Enedis qui est chargée de déployer massivement les compteurs de nouvelle génération sur 95 % du territoire par l’intermédiaire de sous-traitants. Enedis est le gestionnaire du réseau électrique, sauf pour les 5% d’usagers dépendant d’une régie locale historique.

Bon à savoir : Sur injonction de l’Europe et pour permettre une soi-disant « concurrence libre et non faussée », EDF a dû s’ouvrir à la concurrence pour la fourniture de l’énergie en 2007. Les activités de gestion du réseau ont alors été séparées et confiées à une filiale ENEDIS (ex ERDF). Cette activité est toujours un monopole. Peu importe que vous ayez choisi un fournisseur d’électricité alternatif et quitté EDF) pour la pose des compteurs, leur entretien…. C’est toujours ENEDIS qui intervient ! (Sauf pour les 5% d’usagers dépendant d’une régie locale historique)

C’est quoi exactement un compteur Linky ? C’est un compteur « communicant ». Il transmet à l’opérateur la consommation enregistrée dans notre logement : finis les relevés par des agents, finies les estimations.

Il communique régulièrement avec un concentrateur installé dans les postes électriques. Le concentrateur envoie les informations à Enedis en passant par les antennes-relais des réseaux mobiles. Le lien entre compteur et concentrateur se fait par courant porteur en ligne (CPL). C’est-à-dire qu’il utilise les câbles existants et qu’un signal à plus haute fréquences superpose au courant électrique.

Attention au PRM (Point Référence Mesure) –ex PDL (Point De Livraison) – de votre compteur Linky. C’est un numéro à 14 chiffres que l’on peut faire défiler sur le compteur (s’il est accessible) ou que l’on trouve sur la facture…Le numéro de PRM du compteur Linky vous sera demandé à l’occasion de la souscription à un nouveau contrat d’énergie. Et il est important de vérifier que le numéro du compteur et celui de la facture correspondent afin de ne pas payer pour le voisin.

Quelles sont les craintes exprimées ?

À propos de notre santé

Selon l’ ANFR (Agence nationale des fréquences ), les niveaux d’électromagnétisme ne sont pas plus élevés que ceux du Wi-Fi et des téléphones. L’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire) avait rendu quant à elle un avis retenant une « très faible probabilité d’effets sanitaires ».

Le Ministère de la transition écologique et solidaire, déclare que les ondes émises par le système Linky sont « inférieures aux plafonds prévus par les normes sanitaires » définies au niveau européen et français. Donc les normes sont respectées.

Pourtant, le CIRC (Centre International de Recherche sur le Cancer), organisme rattaché à l’OMS, classait les ondes électromagnétiques comme « potentiellement cancérogènes », en 2011. Quant au CRIIREM (Centre de recherche et d’information indépendante sur les rayonnements électromagnétiques), il émettait des réserves sur les calculs de l’ANFR.

Les normes respectées restent discutables car insuffisamment protectrices.

Ainsi les inquiétudes demeurent pour de nombreux consommateurs. Certains ont déjà eu l’occasion de saisir le juge civil. Nombre d’actions ont conclu à l’obligation légale de la pose de ces compteurs. Pourtant, un jugement du 17/11/2020 de la cour d’appel de Bordeaux a validé le droit de refuser ce compteur et exigé la pose de filtres pour les personnes « électro-hypersensibles ». Mais ces décisions sont rares.

À propos du coût

Le coût de l’opération était estimé à plus de 5 milliards d’euros, pour remplacer des compteurs dont la plupart étaient en parfait état de marche et récents.

Le coût de la pose n’est pas facturé au consommateur. Selon Enedis, ces coûts ne devaient pas être répercutés sur les usagers mais « absorbés » par les économies réalisées sur les « pertes électriques » occasionnées par les compteurs mécaniques (pertes dues à leur moindre sensibilité au dépassement de seuil de puissance). Des économies devaient aussi être réalisées grâce à la diminution des fraudes et des coûts d’intervention. En outre, plus de 70 % des opérations effectuées auparavant sur place le seront désormais à distance, ce qui permettra de réaliser d’importantes économies sur le personnel.

Ce discours a été critiqué par la Cour des Comptes début 2018, pointant bien l’intérêt pour le gestionnaire mais un coût à terme pour le consommateur.

C’est notamment au travers du TURPE (Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Électricités), reversé à Enedis et qui représente un bon tiers de la facture que nous paierons ces compteurs.

Le compteur est censé permettre de faire des économies et donc de faire baisser la facture, le consommateur pouvant accéder à ses données de consommation sur un espace personnel du site d’Enedis. Les économies réalisées par ce biais restent à démontrer et c’est faire abstraction des 34% d’usagers qui n’ont pas accès à internet et/ou ne maîtrisent pas l’outil !

Côté factures, certains adhérents se sont déjà émus de voir flamber leurs factures. C’est généralement lié au fait qu’ils ont dû souscrire un contrat d’une puissance plus élevée.

À propos de notre vie privée

Le compteur Linky est en mesure de collecter les données de consommation quotidienne qui sont la propriété du consommateur. Des données journalières (consommation globale du foyer dans la journée) et des données plus fines donc plus sensibles (à l’heure, à la demi-heure… qui en disent long sur nous, nos heures de lever et de coucher, nos absences, le nombre de personnes dans le logement…)

Le code de l’énergie encadre le traitement de ces données en autorisant la collecte des données journalières par défaut pour que le consommateur puisse consulter l’historique de ses consommations. L’enregistrement des données fines s’effectuer dans la mémoire du compteur Linky et y sont conservées,

Ces données fines (dites « courbe de charge ») sont, collectées avec l’accord préalable du consommateur. Pour la transmission de nos données fines notamment à des fournisseurs d’énergie, il faut votre accord préalable exprès.

Le consommateur peut faire ses choix : refuser la collecte et/ou l’enregistrement et modifier ses choix quand il veut. Il suffit de se rendre sur l’espace personnel sécurisé obligatoirement mis en place par le gestionnaire. Le faire par courrier ou téléphone est possible aussi.

La pose chez vous, comment ça marche ?

Enedis doit vous prévenir par un premier courrier 45 jours avant la date prévue pour l’installation, courrier suivi d’un second 15 jours avant la pause. Ce peut être par courrier postal mais aussi par mail.

Ce dispositif a été appliqué au début du déploiement de Linky puis de moins en moins face au nombre de refus.

Le consommateur ne doit pas, a priori, s’opposer à la pose car le compteur ne lui appartient pas. En effet, les compteurs appartiennent aux collectivités locales, qui ont concédé le service public de distribution de l’électricité au gestionnaire de réseau.

Ainsi les textes imposant le déploiement des compteurs Linky s’imposent Enedis et également aux consommateurs. Toutefois, la loi de Transition énergétique ne prévoit pas de « sanction » pour l’usager qui refuserait.

Reste à se reporter aux conditions générales des contrats qui renvoient à celles d’Enedis, et donc à la pose obligatoire Enedis s’est engagé à respecter les refus exprimés des consommateurs. Mais la « sanction » pourrait passer par la facturation supplémentaire d’un relevé manuel des anciens compteurs.

En tout cas, si le compteur est à l’intérieur du logement ou de la propriété, la réponse du Ministère de la transition écologique et solidaire à une récente question parlementaire est tout à fait claire. L’installation doit être faite

« dans le respect du droit de la propriété, dès lors que ce compteur “n’est pas situé sur l’espace public ou dans un endroit accessible” (JO Sénat du 30/01/2020). Si un consommateur ne veut pas ouvrir sa porte, il ne peut pas y avoir de pose forcée !

Enedis peut le changer malgré votre opposition s’il est à l’extérieur de votre logement.

En cas de difficulté avec Enedis, vous pouvez saisir le médiateur de l’énergie en vous rendant sur la plate-forme de résolution de litige en ligne www.sollen.fr ou en écrivant (inutile de timbrer) au Médiateur national de l’énergie – Libre réponse n° 59252 – 75443 PARIS CEDEX 09.

En bref

INDECOSA-CGT conteste l’intérêt du compteur Linky pour les consommateurs parce qu’il peut renchérir le montant de leurs factures en les obligeant à souscrire un contrat d’une puissance supérieure. Si les avantages que les opérateurs escomptent de ces compteurs sont évidents (diminution de la masse salariale liée aux emplois « économisés » …), on ne perçoit pas ceux que les usagers pourraient en retirer. D’autant que de nouveaux contrats « moins chers » proposés aux usagers pourront comporter des délestages. Les économies d’énergie annoncées grâce à Linky sont très aléatoires, même lorsqu’on peut suivre sa consommation sur internet, et l’affichage « déporté » dans le logement prévu pour les plus précaires a été purement et simplement abandonné.

Les normes actuelles d’exposition aux ondes électro-magnétiques émises par ces systèmes communicants demandent à être affinées afin d’être plus protectrices.

La sécurité de nos données personnelles, même validée par la CNIL, ne saurait être garantie surtout dans le contexte de démantèlement du service public de l’énergie.

Enfin, des coupures pour impayés ont été effectuées à distance, dans certaines régions, après un simple échange téléphonique (voire un message) avec l’usager. INDECOSA-CGT exige un contact physique avec l’usager en situation de précarité énergétique avant toute coupure d’électricité ou réduction de puissance.

INDECOSA-CGT revendique le rétablissement d’un service public de l’énergie, seul à même de défendre l’intérêt des usagers et le droit à l’énergie.