Du REFIOM dans l’usine d’incinération de Strasbourg (Sénerval)

REFIOM (Résidus d’Épuration des Fumées
d’Incinération des Ordures Ménagères)

 

Association de consommateurs, INDECOSA-CGT, à travers sa représentation du Bas Rhin, a pour spécificité de s’intéresser tout particulièrement au cadre social et environnemental des produits que nous consommons.

Ces notions s’appliquent également aux services mis à disposition des usagers, que ce soit dans le domaine marchand ou dans le domaine public.

En 2010, l’unité d’incinération de Strasbourg, connue sous le nom de Sénerval, est placée en délégation de service public auprès du groupe Séché. Les incidents ne cessant de se multiplier, les enquêtes qui en découlent font le constat d’une présence d’amiante (pourtant connue de longue date) mais également de celle massive de REFIOM (Résidus d’Épuration des Fumées d’Incinération des Ordures Ménagères, classés substances Cancérigènes, Mutagènes et Reprotoxiques – CMR).

En 2016, le site est fermé pour remise aux normes. Un investissement d’argent public de plus de 220 millions d’euros est réalisé (équipements, salaires, redirection des ordures…). Les travaux vont durer 2 ans.

En 2021, un an après la réouverture de l’unité, nous recevons des informations plus qu’inquiétantes sur ce site. Informations appuyées par des images sans appel…

Au centre, un tas de REFIOM – A gauche, un des sacs de stockage – Encore plus à gauche : les eaux de pluie…

Quelle n’a pas été notre surprise, horrifiés, de découvrir des sacs entiers de REFIOM entreposés un peu partout dans l’usine, voire même en tas au sol, au contact des eaux de pluie, des couloirs noyés de particules CMR, des conduites « réparées » avec du chatterton (qui n’avait pas résisté aux pressions ni aux poussières), d’images des moniteurs de contrôle des fours indiquant clairement de larges périodes de surpression (interrogé à ce sujet, un spécialiste de la question nous assurera que cette situation pourrait mener à l’explosion du four, menaçant la survie de tout ce qui se trouverait dans les 15 mètres autour, assortie de larges projections de poussières CMR)… Sans parler de multiples témoignages de pratiques tout aussi hallucinantes pour les usagers que nous sommes.


Des REFIOM, encore des REFIOM, toujours des REFIOM… (rappelons bien qu’il s’agit de matières CMR)

En Octobre 2020, nous adressons un courrier à l’Eurométropole de Strasbourg, à la Mairie de Strasbourg, au Groupe Séché et à l’usine Sénerval. Côté prestataire, la réponse est rapide et se résume par « Soyez assurés que Sénerval s’inscrit dans une démarche de progrès continu, qui vise à analyser les retours d’expérience et mettre en place les actions correctives chaque fois que cela est nécessaire. » Les autorités publiques mettront deux mois à nous répondre, sur le mode « Nous nous en remettons aux autorités de contrôle » (DIRRECTE et DREAL).

Aucune des questions soulevées dans notre courrier n’obtiendra de réponse concrète. Et toutes les structures vers lesquelles nous nous tournerons, à l’exception d’une seule, nous opposeront un silence assourdissant….

Début Novembre, sort un article de Rue89 (média local) titré « Alertée, la Dreal découvre des cendres hautement cancérigènes partout dans l’incinérateur de Strasbourg ». Et la colère nous gagne.


Question : combien de temps faut il pour découvrir que ces gros sacs, qu’on retrouve un peu partout dans l’usine, sont remplis de REFIOM ?…

La colère, car l’article ne reprend rien de plus que ce que nous avons signalé depuis un an.

La colère, car en retour de nos alertes nous n’avons reçu que des réponses condescendantes.

La colère, car si brusquement il s’avère que ces sacs de REFIOM entreposés partout dans l’usine, certains à la merci des vents et des eaux de pluies, existent bel et bien et ne sont pas le fruit de notre trop grande écoute de rumeurs alarmistes, alors qu’en est il de nos autres questions ?

Rappelons ici ce qui se trouvait dans nos courriers de 2021, en dehors de notre alerte sur le stockage de ces résidus :

  • Est il vrai que la délégation de service public signée par l’Eurométropole implique que les travaux lourds soient laissés à la charge de la communauté, incitant par là même le délégataire (quel qu’il soit) à ne pas effectuer de travaux sur les problèmes légers, pour ne pas avoir à en supporter le coût ?
  • Est-on vraiment certain que les riverains et les salariés ne s’exposent à aucun risque de type CMR lié à l’activité de l’usine ? Comment le garantir si des REFIOM traînent un peu partout au gré du vent et des eaux de pluie ?
  • Est-il seulement possible qu’il soit de façon récurrente, bien plus fréquemment que d’ordinaire, fait recours à des explosifs dans les fours pour libérer les canalisations des poussières accumulées, et ce alors que le four n’est pas à l’arrêt ?
  • Qu’il y a-t-il de vrai dans l’affirmation que, faute de moyens, la quasi totalité des camions de déchets ne fasse pas l’objet de contrôles ce qui fait qu’on retrouve régulièrement des substances interdites voire dangereuses dans les fosses ?
  • Est-il seulement imaginable que les journaux de logs de pression démontrent clairement qu’il y a de lourds dysfonctionnements, mais que personne ne semble s’en inquiéter ?

Nous sommes en colère, car nous venions à peine de recevoir une invitation pour le Forum Mondial de la Démocratie organisé par le Conseil de l’Europe, la Ville de Strasbourg, la Région Grand Est, la Collectivité européenne d’Alsace et l’État français !

Mais de quelle démocratie parle-t-on ? De celle qui consiste à écouter les alertes envoyées par des associations de bénévoles qui ne comptent pas leur temps et s’impliquent dans la vie citoyenne de leur territoire ? Ou de la « Démocratie par délégation » qui consiste à se reposer sur des élus et des responsables qui s’empressent d’utiliser des éléments de communication pour surtout ne pas faire de vagues et assurer leur reconduction à leurs postes ?

Un an s’est écoulé. Une année inutile. Une année toxique pour toutes celles et ceux qui y auront été exposés. Une année dont ils seront en droit de réclamer des comptes auprès des responsables.

Le Président d’INDECOSA-CGT BAS RHIN,

François BILEM