Vous venez de trouver un logement dans le parc privé, mais à quel prix ?

A supposer que vous soyez bienvenu dans ce logement privé, que votre candidature ait plu….Voilà, c’est fait, vous avez un toit sur la tête. Mais vous n’avez évidemment pas pu négocier les conditions du contrat. C’est souvent ainsi, et peut-être même avez-vous accepté un logement trop énergivore, un loyer mensuel trop élevé, une surface trop petite…

Car c’est un fait, quand les offres sont moins nombreuses que les demandes, quand un bailleur n’a que l’embarras du choix, il est certain de trouver preneur quoi qu’il en coûte. Et il peut être bien tentant d’abuser de la situation, de s’affranchir des règles. Pourtant, des règles s’imposent au bailleur qui change de locataire. Il ne peut pas faire n’importe quoi.

Mais c’est signé, c’est fait, alors vous vous dites qu’il est trop tard. Car vous le savez, le code civil dispose que « Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. » (article 1103). Et pourtant, vous pouvez peut-être encore agir pour peu que vous le fassiez rapidement après votre entrée dans les lieux. C’est tout le charme des textes d’ordre public comme la loi du 6 juillet 1989, il n’est pas possible de les contredire par contrat. Une question de hiérarchie.

Quelques petites vérifications s’imposent. Vous avez votre contrat de location en main ? Voyons cela… Car ce n’est pas parce que vous avez pris possession des lieux qu’il est trop tard d’envisager de solliciter une diminution de loyer, par exemple.

Votre logement est extrêmement énergivore

Voilà un critère intégré à la notion de « décence » prévue par la loi du 6 juillet 1989. La consommation énergétique du logement en énergie finale, calculée par le diagnostic de performance énergétique (DPE) doit être inférieure à 450 kWh/m²/an. À défaut, le logement est une passoire énergétique, considéré comme « indécent».

La conséquence est sans appel. Depuis le 24 août 2022, il est impossible d’appliquer à un nouveau locataire un loyer supérieur à celui du précédent locataire si le logement appartient à la classe énergétique F ou G défini au Diagnostic de Performance Energétique (DPE) obligatoirement affiché sur les annonces et fourni à la conclusion. (article L.173-1- 1 du Code de la Construction et de l’Habitation).

Bon à savoir : vous pouvez faire une vérification du DPE sur le site de l’Observatoire de l’ADEME (https://observatoire-dpe.ademe.fr/accueil), entrez le numéro de votre DPE.

Un classement en F ou G veut également dire : plus de révision annuelle à venir, clause d’indexation prévue au contrat ou pas ! Alors évidemment, il vous faut connaître le loyer de l’ancien locataire.

Connaître le loyer du locataire sortant

Pas de souci en principe (mais toujours des soucis en pratique) car l’article 3 de la loi du 6 juillet 1989 dispose (et c’est impératif) que le contrat de location contient « le montant et la date de versement du dernier loyer appliqué au précédent locataire, dès lors que ce dernier a quitté le logement moins de dix-huit mois avant la signature du bail.»

Vous avez beau relire votre bail, vous n’avez pas eu l’information ? Dans ce cas, il ne va pas falloir perdre de temps pour réagir (délai très court !). Vous pouvez, dans un délai d’un mois à compter de la prise d’effet de votre bail, mettre en demeure le bailleur de vous fournir cette information. S’il ne répond pas dans le délai d’un mois ou s’il refuse, un délai de trois mois démarre à compter de la mise en demeure, pour saisir le juge ( et obtenir possiblement une
diminution du loyer). Ne dépassez pas les délais. Rapprochez-vous au plus vite de votre association Indecosa-Cgt de secteur si vous avez besoin d’aide, ICI le lien.

Vous ne louez pas une passoire et pourtant…

Est-ce qu’un bailleur peut fixer à son nouveau locataire le loyer qu’il lui plaît ? Pas tout à fait. On vient de le voir, la classe énergétique est un frein mais ce n’est pas le seul. Car se pose également la question de savoir où vous vous installez. La géographie (la ville voire le quartier) peut avoir son importance. « La zone » peut appeler une réglementation particulière. Et peut-être bien que votre loyer dépasse ce qui est permis. Là, aussi une petite vérification s’impose.

Vous avez trouvé un logement dans une « zone tendue ».

Il existe des zones où la tension locative est particulièrement importante. La règle du marché ne fonctionne pas, pas de concurrence, tout se loue… Pour ces « zones tendues », plusieurs règles peuvent se cumuler.

Une règle s’applique quasiment à toutes, c’est celle de l’encadrement de l’évolution des loyers. Elle limite l’évolution des loyers entre deux locataires quel que soit le classement énergétique. A moins que le bailleur ne justifie d’un loyer manifestement sous-évalué par rapport à ceux du voisinage, ou qu’il fasse des travaux d’amélioration etc… qu’il devra justifier. Mais le principe est bien qu’ il ne peut pas faire la «bascule » à l’occasion d’un changement de locataire. Un peu tentant quand les candidats locataires sont si nombreux que de faire monter les prix !

Attention, en cas de litige sur l’application du décret d’encadrement de l’évolution du loyer, avant toute saisine du juge, il faut saisir préalablement la commission départementale de conciliation, c’est obligatoire ! Mais faute de délai précisé dans le texte, vous devez pouvoir protester dans le délai de 3 ans ( prescription locative).

Le décret du 20 juillet 2023 relatif à l’évolution, a reconduit le dispositif d’encadrement de certains loyers pour un an, jusqu’au 31 juillet 2024. Et vous êtes de plus en plus nombreux à être concernés ! Le décret du 25 août 2023 a modifié la liste des communes comprises en zone tendue ( ex : Caen, Rennes, Orléans, Creil, Nîmes…. ) et ce n’est pas fini.. Pour savoir  précisément (sans finir par se perdre dans les textes) dans quelle zone vous vous situez, consultez le simulateur (officiel) prévu à cet effet : Simulateur – Savoir si un logement est situé en zone tendue – Zonage – service-public.fr

Un possible « plafonnement » des loyers à ne pas dépasser.

La zone (tendue) dans laquelle vous venez de vous installer peut-être soumise, en plus, à un encadrement du niveau des loyers. Cette fois, il s’agit de définir un véritable plafond aux loyers pratiqués. Pour qu’un « plafond de loyer » s’applique à votre logement, il faut que le Préfet rende un arrêté. L’encadrement du montant des loyers prendra effet.

De nouvelles agglomérations demandent à intégrer ce dispositif (car cela se demande), et nous l’avons dit, la liste des villes évolue. Si vous vous installez prochainement au Pays Basque, ouvrez l’œil par exemple, le décret du 25 octobre 2023 a mis en place le dispositif d’expérimentation d’encadrement du niveau des loyers sur 24 communes du territoire de la communauté d’agglomération . L’arrêté préfectoral est attendu pour 2024. Affaire à suivre…

Pour mémoire : les textes valent pour l’avenir et concernent les contrats de location signés ou renouvelés à partir de leur publication.

Vous voulez connaître les loyers de référence de votre zone

Les arrêtés préfectoraux sont indispensables, ils ont vocation à déterminer les loyers de référence de chaque territoire, voire par secteur, etc… Pour ce faire, il faut s’appuyer sur un diagnostic, sur des chiffres. Ces chiffres sont fournis par des observatoires des loyers.

Chaque loyer de référence défini par arrêté est un loyer « médian » calculé à partir des niveaux de loyers constatés par l’observatoire local des loyers selon les catégories de logements et les secteurs géographiques, exprimés par un prix au mètre carré de surface habitable. Le loyer « plafond », à ne pas dépasser est le loyer « majoré » (d’un montant supérieur de 20 % au loyer de référence).

Bon à savoir : Un observatoire des loyers est une association loi 1901 ou un groupement d’intérêt public spécifiquement agréé par le ministère du Logement, les associations de locataires y ont leur place. Vous pouvez y trouver des informations et des statistiques intéressantes sur le marché locatif dans votre zone, pour vous faire une idée.

Selon votre lieu d’habitation, n’hésitez pas à le consulter. Les collectivités territoriales soumises à l’encadrement du niveau des loyers mettent à disposition des simulateurs, des cartographies. Vous pouvez y entrer une localisation, décrire la catégorie de logement… Vous saurez tout.

Un complément de loyer, c’est possible mais parfois discutable

Exiger de vous un loyer supérieur au plafond fixé ( loyer de référence majoré) est possible pour certains logements, lorsque le logement présente « des caractéristiques de localisation ou de confort par comparaison avec les logements de la même catégorie situés dans le même secteur géographique » . Veillez à ce que ces caractéristiques ne soient pas déjà prises en compte dans la détermination du loyer de référence, qu’elles soient déterminantes et qu’elles ne donnent pas lieu à récupération au titre de charges, ou de contribution au partage des économies d’énergie pour les travaux réalisés par le bailleur. Pas de cumul. Et il est exclu qu’un complément soit appliqué en cas de « …. sanitaires sur le palier, des signes d’humidité sur certains murs, un niveau de performance énergétique de classe F ou de classe G …., des fenêtres laissant anormalement passer l’air hors grille de ventilation, un vis-à-vis à moins de dix mètres, des infiltrations ou des inondations provenant de l’extérieur du logement, des problèmes d’évacuation d’eau au cours des trois derniers mois, une installation électrique dégradée ou une mauvaise exposition de la pièce principale. » ( article 140 loi Elan).

Contester le complément de loyer abusif, c’est possible dans les 3 mois de la signature du bail. Il convient au préalable de saisir la Commission Départementale de Conciliation ( CDC). Et c’est au bailleur de démontrer que les caractéristiques du logement justifient le complément. Si aucune conciliation n’est possible devant la commission départementale de conciliation, il faudra saisir le juge pour demander l’annulation ou la diminution du complément de loyer. Là encore, le délai est court, le locataire doit impérativement saisir le juge dans les 3 mois à compter de la réception de l’avis de la commission. S’il y a annulation ou réduction du complément, cela vaut à compter de la prise du bail.

Dernière vérification : vous avez des doutes sur la surface habitable

Voilà une vérification qui vaut pour tout logement quelle que soit sa zone… Car la loi du 6 juillet 1989 ne permet pas d’écart de plus de 1/20 (5 %) entre la surface prétendue et la surface réelle.

Deux situations sont possibles :

Vous ne trouvez pas l’information (pourtant impérative) sur la surface dans votre contrat ? Mettez votre bailleur en demeure ( par LRAR) dans le mois qui suit le début du bail. Sans réponse ou si sa réponse ne vous convient pas, saisissez le juge dans les trois mois de la réception de votre mise en demeure, pour demander une diminution de loyer.

Vous trouvez l’information et vous constatez une trop grande différence ?
Exigez une diminution de loyer proportionnelle, même si le bail a commencé depuis plusieurs mois cette fois. Mais dès lors que vous vous lancez, respectez bien la procédure et ses délais. Envoyez une lettre recommandée avec avis de réception au bailleur qui doit vous répondre dans les deux mois. La Cour de Cassation a rappelé dans un arrêt récent (chambre civile III du 20 avril 2023) que cette tentative de négociation amiable est impérative sous peine d’irrecevabilité. A défaut d’accord ou de réponse de votre bailleur dans ce délai, ne perdez pas de temps, il faut saisir le juge dans les quatre mois de la réception de votre mise en demeure pour demander une diminution de loyer. À défaut, vous seriez forclos ( impossible d’agir ensuite). La diminution de loyer négociée avec le bailleur ou prononcée par le juge, s’appliquera à compter de la date de signature du bail si vous avez formulée votre demande dans les six mois de la conclusion du bail ou de la date de votre demande si vous l’avez faite après six mois.

En conclusion, n’hésitez pas à vérifier les termes de votre bail et les conditions que vous avez acceptées, parfois contraints par la difficulté de trouver un toit.

Obtenir une diminution de loyer, après être entré dans les lieux, c’ est parfois possible.

Pour INDECOSA-CGT