Des contrats de consommation multiples et coûteux

Publié le 24 janvier 2023

 

Petit panorama des vertus de  l’infidélité

La résilience… Un bien joli mot, très à la mode. Quand les difficultés s’accumulent, il faudrait s’adapter, vivre avec, accepter… Et si au lieu de ça, on plaquait tout pour voguer vers d’autres horizons. En matière de contrats de consommation, on ne parlera pas de séparation bien sûr, on parlera de résiliation.

Résilier des contrats, les professionnels savent le faire. Des exemples ? Si vous avez des accidents non responsables à répétition, votre assureur risque bien de vous signifier la fin de votre contrat, tant pis pour vous, il n’est pas de bon ton d’avoir ainsi la « poisse ». Le meilleur des assurés ne serait-il pas celui qui paie rubis sur l’ongle sans jamais de sinistre à déplorer ! Plus récemment, ce sont les fournisseurs d’énergie qui se séparent de vous, allez voir la concurrence ! Il semble loin le temps où les professionnels aimaient se faire « oublier », enfin, nous faire oublier le terme de nos contrats, leurs dates « anniversaire ».

La durée d’un contrat est toujours une information capitale pour un consommateur, et il conviendra de lire avec attention les conditions générales qui nous sont soumises afin de vérifier ce point particulier. Il nous faut connaître le terme de nos contrats. Les contrats à « durée déterminée » sont par exemple, les contrats de prêt. Vous vous engagez sur 36 mois, 48 mois … voire plus pour un contrat de prêt immobilier. Le terme est fixé et l’engagement prendra fin sans qu’il soit utile de manifester notre volonté. Si d’aventure, il n’y a pas de terme, nous voilà face à un engagement « à durée indéterminée ». Celui-là aura l’avantage de permettre un désengagement et les conditions pour le faire seront précisées car nous ne pouvons pas être engagé « à vie ». Les contrats perpétuels sont nuls.

Mais bien souvent, nos contrats commencent par une durée fixée contractuellement et poursuivent leur vie. Soit de la volonté des parties qui auront prévu une clause à cet effet. Soit parce que la loi le prévoit (souvent dans le but de nous protéger).

La clause de reconduction tacite

Comme son nom l’indique, c’est « une clause ». Il faut donc impérativement qu’elle ait été prévue et figure au contrat. Sans intervention de notre part, elle a tout de même pour effet de nous engager de nouveau, pour une même durée et aux mêmes conditions que le contrat initial (prix etc.…).
Les professionnels ont longtemps profité des bienfaits de la reconduction tacite de nos contrats. Un atout pour eux (qui aimeraient tant nous garder la plupart du temps). Elle est souvent intégrée dans des contrats d’adhésion que nous signons sans pouvoir les négocier. Certains n’hésitent d’ailleurs pas à se ménager des occasions de résiliation beaucoup moins contraignantes pour eux-mêmes ! Un travers dénoncé par la Commission des Clauses Abusives.

Respecter un préavis

Vous constaterez en lisant les conditions générales de votre contrat qu’une période de préavis est souvent prévue pour manifester votre volonté de reprendre votre liberté. Une durée de préavis qu’il vous faudra impérativement respecter et qui varie possiblement d’un contrat à l’autre, car elle s’adapte à la durée initiale. À lire absolument.
Mais les consommateurs ont tant de contrats, à dates d’échéance si différentes qu’il est facile de « perdre le fil ». Le législateur l’a bien compris. Les professionnels doivent nous informer.

Le code de la consommation définit ainsi un cadre général pour les contrats de prestations de service conclus pour une durée déterminée avec une clause de reconduction tacite. L’article L 215-1 impose au professionnel de nous rappeler que la date permettant de manifester notre refus de reconduction approche. Il doit nous informer aux plus trois mois et au moins un mois avant la date limite de non-reconduction. Une information qui doit être claire et compréhensible, d’ailleurs la date de non-reconduction doit figurer très visiblement dans un encadré. S’il ne nous informe pas, la sanction est simple : nous pouvons résilier à tout moment après la date de reconduction. Attention l’information peut nous parvenir par courrier nominatif « ou électronique ». Mieux vaut vérifier nos spams.

Au-delà des règles générales, il existe des règles particulières dans le code de la consommation. Par exemple, pour les contrats de services financiers conclus à distance, les obligations d’information s’appliquent uniquement au contrat initial. Après le premier renouvellement, le contrat sera automatiquement reconduit si personne ne demande pas la résiliation. A nous d’y penser.

D’autres contrats devront être regardés à la lumière de leur propre code. Les contrats d’assurance dépendront du code des assurances, par exemple. Des conditions d’information par l’assureur sont précisées : rappel de la date sur chaque avis d’échéance ou cotisation, délai pour réagir (qui peut être rallongé si l’assureur a prévenu trop tard, etc. …). Avec des contrats d’assurance qui sont parfois résiliables à tout moment, après un an. Ce sera le cas de l’assurance habitation et automobile, plus récemment de la complémentaire santé… Catégories auxquelles s’ajoute, depuis le 1er septembre 2022, le contrat d’assurance emprunteur (à garanties équivalentes).

Attention, à compter du 1er juillet 2023, dans six mois, ce sont tous nos contrats d’assurance individuels qui pourront être résiliés à tout moment passée la première année. Nos assurances de protection juridique, d’accidents de la vie entrent dans le champ par exemple…et rejoignent les autres.

Une loi particulière peut réglementer la durée et reconduction du contrat

Ce sera le cas en matière de location immobilière. La loi du 6 juillet 1989 qui régit les rapports locatifs oblige les bailleurs privés à signer des baux de trois ans et prévoit une clause de reconduction tacite au terme. Mais ce texte d’ordre public a pour vocation de protéger le locataire qui, lui, n’est jamais obligé de respecter la durée ainsi fixée. Seul le bailleur est contraint, ne pouvant donner congé plus tôt. Et encore, en respectant un formalisme exigeant. Un locataire donne congé quand il veut (dans le respect des délais et du formalisme imposé bien sûr).

Bon à savoir : le congé donné par un locataire se calcule « au quantième », c’est à dire « de date à date ». Le bailleur qui aura reçu un congé pour 15 du mois, par exemple, devra calculer le dernier loyer au prorata. Prétendre que « tout mois commencé est dû » est faux.

Partir à tout moment est possible dans certains cas, sans aucune période initiale d’engagement et pas seulement pour les locataires. C’est la même chose pour nos contrats d’énergie. Il convient de le repréciser ici car nous signons souvent des contrats sur une, deux, trois, voire quatre années.
Attention, cet engagement sur la durée n’oblige que le fournisseur ! Pas le consommateur.

Bon à savoir : si vous avez un contrat à tarif réglementé ou indexé sur le tarif réglementé (parfois à prix plus faible encore), gardez-le. Le bouclier tarifaire mis en place par les pouvoirs publics est une protection. Tant que votre fournisseur est tenu au prix négocié parce que le terme n’est pas arrivé, ne cédez pas aux invitations de changer. Faites vos comptes, comparez.

Vous tentez de résilier votre contrat en vain !

Voilà un problème rencontré trop souvent par les consommateurs qui ont souscrit des contrats électroniques. Il est si facile de souscrire en ligne mais pour ce qui est de résilier, ça tourne vite au casse-tête. Parce qu’on arrive à joindre personne, que le consommateur n’a aucune suite à sa demande, qu’il est exigé de lui des tas de formalités (lettre recommandée…). Une vraie galère…

La loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat du 16 août 2022 s’est intéressée à ce type de contrats à reconduction tacite. Elle impose aux professionnels qui proposent leurs contrats de prestation de service ou d’assurance par voie électronique, de prévoir une fonctionnalité gratuite pour résilier. C’est déjà le cas en Allemagne. Résilier par un double clic par exemple (ou triple ?), nous attendons le décret d’application pour en savoir plus, mais les sites devront être prêts avant le 1er juin 2023. Et cela vaudra pour les contrats souscrits avant et autrement dès lors que le professionnel permet ensuite de conclure et résilier par voie électronique. La fonctionnalité vaudra pour tous. Tout manquement sera passible d’une amende administrative (jusqu’à 15 000 € pour une personne physique et 75 000 € pour une personne morale).

Pour nos contrats de téléphone et d’internet, du nouveau également. Il était possible de résilier un abonnement de plus de douze mois de façon anticipée en réglant des frais de résiliation qui pouvaient être dissuasifs (un quart des mensualités restantes sur un abonnement de 24 mois). C’est fini pour les contrats souscrits depuis le 1er janvier 2023, ces frais de résiliation sont supprimés. Attention cependant si vous avez contracté une offre avec smartphone « subventionné », des frais (minorés) persistent. Du nouveau aussi pour les consommateurs en
situation de surendettement, une demande recevable, leur permettra de résilier à tout moment.

Pour les contrats de fourniture de service de télévision et médias audiovisuels à la demande, la loi prévoit une nouvelle exception à la reconduction tacite du contrat pour les consommateurs qui déménagent ou dont le foyer fiscal change. Ceux-là pourront, après la première reconduction, résilier gratuitement à tout moment.

Vous le voyez, les contrats sont multiples, les textes aussi et ils évoluent. Impossible de vous faire ici un panorama exhaustif. Aussi, n’hésitez pas à demander conseil aux bénévoles d’INDECOSA CGT car il y a bien des occasions de quitter un professionnel pour un autre, à des termes et dans des conditions définies. L’association vous aidera à « qualifier » le contrat que vous lui soumettez et à trouver le texte correspondant, dans le respect des démarches imposées.

Et n’hésitez pas à faire quelques vérifications

  • Lister vos différents contrats, vos différents abonnements. Êtes-vous certains de vous souvenir de tous ? Vous pourriez avoir des surprises. C’est là tout le charme de la reconduction tacite, vos contrats se font oublier…Certains consommateurs découvrent même des abonnements à résilier qu’ils n’ont pas voulu souscrire, des abonnements cachés, obtenus lors de commandes en ligne.
  • Tous ces contrats qui vous lient sont -ils adaptés à vos besoins. Exemple : vous vous êtes inscrit à une salle de sport mais vous n’y allez qu’un mois ou deux avant d’abandonner. Peut-être qu’un renouvellement ne s’impose pas.
  • Un contrat adapté à votre usage a-t-il été souscrit au meilleur rapport qualité prix ? Des économies sont peut-être possibles. Faites un petit tour de la concurrence… Le meilleur choix d’hier n’est peut-être plus celui d’aujourd’hui. Sans compter que parfois, votre fournisseur de service offre des périodes d’abonnement gratuites aux nouveaux entrants, sans jamais penser à vous. Parlez-lui de résiliation possible et il y a fort à parier qu’il vous offrira une période de gratuité, pour vous garder.

Car notre fidélité sans faille est une chance pour les professionnels, le plus souvent. Voire une rente. A nous d’oser tester les vertus de l’infidélité et d’en tirer le meilleur parti.

Pour INDECOSA-CGT

Consom’Info N°82 – 23 janvier 2023 – Fiche d’information

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