Tel qu’il est proposé, va-t-il régler
l’accès aux produits alimentaires
en quantité et en qualité ?
Qu’est-ce que le panier anti-inflation ?
Voilà des mois que l’on en parle. À la mi-janvier, la ministre déléguée au Commerce, Olivia Grégoire, a promis de défendre le pouvoir d’achat des consommateurs avec la création le 1er mars prochain d’un panier contenant 50 produits « vendus au meilleur rapport qualité prix », notamment cinq fruits et légumes, dont trois bio, du poisson et de la viande rouge ou blanche.
Une mesure sociale qui paraît indispensable alors que la hausse des prix alimentaires a atteint en janvier 13 % sur un an, selon l’Insee.
La mise en place de ce panier anti-inflation n’aurait rien d’obligatoire. Le Ministère du commerce évoque un engagement volontaire des distributeurs plutôt que des dispositions législatives ou réglementaires contraignantes. Chaque enseigne est donc libre de choisir le contenu du panier et de se retirer à tout moment de cette mesure.
Où en est-on de l’inflation ?
Avec près de 14 % d’augmentation des prix en 2022, les produits alimentaires sont les premiers produits concernés par l’inflation qui pourrait s’établir à 15 % en juin. Pour les ménages, cela pourrait représenter un surcoût moyen de 790 euros par rapport aux mêmes courses en 2021. « 45 % des Français sont aujourd’hui fragilisés par la hausse des prix, soit 25 points de plus qu’en mai dernier. Ils sont 13 millions de foyers à être très juste au niveau finances et près de 3 millions qui ne s’en sortent plus du tout ». Ainsi, les consommateurs pourraient être confrontés à d’importantes hausses dès le 1er mars.
La grande distribution parle déjà d’un mois de « mars rouge » sur le terrain de l’inflation alimentaire. Elle «prendra tout simplement la forme d’un mur», et le portefeuille des ménages va en prendre un coup.
Qui décide des prix ?
Confrontés à la hausse des coûts des matières premières et de l’énergie, les industriels souhaitent fortement augmenter les prix, pour une application début mars.
Des négociations annuelles menées en ce moment entre les industriels et la grande distribution, qui s’achèvent le 28 février vont déterminer de futures hausses à prévoir pour les Français. Le Parisien évoque des augmentations jusqu’à 40 % de hausse sur de nombreux articles. « Les marques de distributeur ont déjà augmenté leur prix l’an dernier. Le rattrapage va venir de ce que l’on appelle les grandes marques », précise le journaliste de 60 Millions de consommateurs Lionel Maugain.
La loi oblige les distributeurs à ne pas descendre sous le seuil des 10% de marge pour tous les produits alimentaires, afin d’éviter qu’ils se livrent à une spéculation potentiellement dangereuse pour les fournisseurs. Cette loi inflationniste frappe durement les produits premiers prix ».
Quel impact sur les plus fragiles ?
Selon l’INSEE, si en moyenne annuelle sur 2022 la hausse des prix à la consommation a atteint 5,2 %, pour les produits alimentaires elle a été de 12,1 %.
Néanmoins, ce chiffre atténue une situation plus violente puisqu’il invisibilise le fait que, pour les plus modestes, cette inflation est encore plus élevée. En effet, les produits ayant le plus augmenté sont les produits premiers prix et les marques distributeurs, ces derniers ayant proportionnellement un coût matière première plus élevé. Ainsi, les consommateurs les plus pauvres qui étaient déjà contraints avant la crise d’acheter des produits bas de gamme sont davantage touchés par la hausse des prix. Une double peine.
La directrice de recherche à l’Inrae (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) et experte en nutrition, Nicole Darmon, explique qu’avec l’augmentation des prix, de moins en moins de consommateurs pourront s’acheter des fruits et légumes. Or ce sont les éléments de base d’une alimentation saine à forte valeur nutritionnelle. Tout est devenu « cher ». En à peine un an, le prix des légumes frais a notamment augmenté de 33,9 %.
Avec le coût de certains ingrédients qui monte en flèche, les industriels sont tentés d’économiser sur leur budget en remplaçant les composants de leurs produits par des éléments encore moins chers, moins gustatifs et moins nutritifs. C’est ce qu’on appelle le « cheapflation » (mix de « cheap » ou bas de gamme avec inflation).
C’est une pratique récente venant des États-Unis qui s’est étendue jusqu’en Europe et qui risque de se répandre un peu plus avec l’inflation. Cette autre conséquence de la récession représente le principal recours des grandes enseignes afin de conserver leur marché et leurs marges. En bref, rien qui ne tende vers une alimentation saine et équilibrée.
Économiser au détriment de son régime alimentaire : quelles conséquences ?
Aujourd’hui, privilégier les produits gras et moins digestes à une alimentation saine est plus une nécessité qu’un choix. L’inflation n’influe pas seulement sur les salaires et le pouvoir d’achat, mais aussi sur la qualité des produits vendus en rayon et du régime alimentaire des consommateurs et donc sur la santé. Le gouvernement préfère s’en remettre à la bonne volonté des grandes enseignes de supermarchés. Dans l’idéologie au pouvoir, l’action publique et les services publics se retrouvent remplacés par Super U, Carrefour, Leclerc, et autres.
Propositions Indecosa CGT
- Mettre fin aux dispositions de la loi Egalim, qui obligent les enseignes de distribution à réaliser une marge « minimale » de 10 % sur les produits alimentaires ;
- Une composition du panier plus conséquente qui couvre réellement les besoins des consommateurs y compris les plus démunis ;
- Rendre obligatoire la mise en œuvre du panier anti-inflation ;
Pour le collectif alimentation – Gérard Casolari – Indecosa 83